Je n'ai jamais eu beaucoup d'accroche avec Yves Duteil. Dans l'ensemble, je trouve ses chansons plutôt convenues ; difficile d'être interpellé, touché. Je veux dire vraiment "attrapé".

Sauf. Sauf avec cette chanson.

J'ai hésité à la présenter ici. A sa sortie, j'avais 16 ans, je suis tombé dessus par hasard et je garde fort le souvenir d'un bouleversement. C'était beau, et cela sublimait en moi une libido tenace, laborieuse, animale... mais sans objet (à l'époque). Et cette manière forte de parler d'amour charnel m'avait vraiment enthousiasmé.

Aujourd'hui, je trouve toujours que la chanson est belle y compris dans sa sonorité très "bossa". Elle ne me fait plus le même effet.

Je décide tout de même de l'intégrer à mon panthéon. D'une part parce qu'elle est globalement inconnue et qu'elle mérite un détour ; et qu'ensuite, elle fut pour moi une référence intérieure. Et même si c'était il y a longtemps, c'était moi quand même !!

"Y goûter la folie qui mène à la sagesse Et cueillir un soleil qui passe à ma portée "

Ton univers se penche au bord de ma misère
Et ton regard s'éclaire en rencontrant le mien
Je voudrais que ça dure encore un millénaire
C'est comme une oasis au milieu du chagrin

Je voudrais boire encore à cette source fraîche
Sentir couler ta voix dans le creux de mon cœur
Éprouver du bonheur, avoir la gorge sèche
En caressant tes seins comme on touche une fleur

Poser sur tes cheveux des paillettes de lune
Et diriger mes doigts par des chemins cachés
Qui s'effacent en s'ouvrant comme sable de dunes
Vers une plage offerte en perles de rosée

Croquer de ton jardin tous les fruits de tendresse

Sur ta peau qui frissonne au fil de mes baisers
Y goûter la folie qui mène à la sagesse
Et cueillir un soleil qui passe à ma portée

Je voudrais croire encore à ces instants de trêve
Où plus rien du dehors ne peut nous arriver
Quand nos regards se perdent au plus profond du rêve
Que nos heures se confondent avec l'éternité

Oublier quelque temps l'ombre de la tristesse
Pendant que le bonheur s'endort à nos côtés
Bercés par la douceur du vent qui nous caresse
Perdus dans la langueur d'un infini baiser

Berçés par la douceur du vent qui nous caresse
Perdus dans la langueur d'un infini baiser.

Instants de trève, 1985