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Mon Panthéon des chansons

Pénélope ; le Blason

4 Décembre 2015 , Rédigé par phil filoche

Georges Brassens n’est pas un artiste comme les autres. Il est le souverain-chanteur ; ou le prince de la chanson ; c’est selon. Pour moi il est LA source.

Les raisons en sont multiples.

On ne découvre pas Brassens, on en hérite. Le plus souvent par un proche, un ami. On entre dans son œuvre par le rituel du don. On fait découvrir.

Je suis entré chez George par un 33 tours crépitant. Celui que mon père m’a donné à entendre. Je devais avoir une dizaine d’années. Je me rappelle encore, bien des années plus tard, de ces moments magiques ou nous avons écouté La supplique et les autres chansons de l’album. Je pense, avec le recul, que cela a posé en moi des jalons indestructibles. Et particulièrement l’amour de cette langue belle, émouvante, drôle, incisive.

Je me souviens de l’émotion de mon père apprenant que le sétois avait cassé sa pipe. Nous étions en famille et sur la route. Ses succès défilaient sur les grandes ondes… Et à un moment, sur cette route des vacances, nous avons distingué le Mont St Clair scintillant dans la nuit.

Alors bien sur retenir une chanson quand mon âme vibre pour des dizaines, c’est un crève-cœur ; j’en évoquerai d’autres plus tard.

Je choisis ici deux bijoux ; et cela tombe bien puisqu’il s’agit du Blason et de Pénélope.

Pénélope et ses pensées interlopes… mot qu'il m’a fallu découvrir et comprendre en ouvrant le dico… Mais cet hymne à l’amour, à la passion est un texte d’une incroyable finesse, d’une bouleversante poésie ; cette amourette « qui met le désordre à vos dentelles » et arrache la feuille de vigne.

Et l’hommage continu avec ce Blason « J'eusse aimé célébrer sans être inconvenant
Tendre corps féminin ton plus bel apanage » ; quel redoutable style. Quel génie, quelle galanterie ! Un morceau de choix en définitive.

"le désordre à vos dentelles"

Toi l'épouse modèle,
Le grillon du foyer;
Toi qui n'a point d'accrocs
Dans ta robe de mariée;
Toi l'intraitable Pénélope
En suivant ton petit
Bonhomme de bonheur,
Ne berces-tu jamais
En tout bien tout honneur
De jolies pensées interlopes?
De jolies pensées interlopes...

Derrière tes rideaux,
Dans ton juste milieu,
En attendant l'retour
D'un Ulysse de banlieue;
Penchée sur tes travaux de toile,
Les soirs de vague a l'âme
Et de mélancolie
N'as tu jamais en rêve
Au ciel d'un autre lit
Compté de nouvelles étoiles?
Compter de nouvelles étoiles...

N'as-tu jamais encore
Appelé de tes vœux
L'amourette qui passe,
Qui vous prend aux cheveux?
Qui vous compte des bagatelles,
Qui met la marguerite
Au jardin potager,
La pomme défendue
Aux branches du verger,
Et le désordre a vos dentelles?
Et le désordre a vos dentelles...

N'as-tu jamais souhaite
De revoir en chemin
Cet ange, ce démon,
Qui son arc a la main
Décoche des flèches malignes?
Qui rend leur chair de femme
Aux plus froides statues,
Les bascul' de leur socle,
Bouscule leur vertu,
Arrache leur feuille de vigne...
Arrache leur feuille de vigne...

N'ait crainte que le ciel
Ne t'en tienne rigueur,
Il n'y a vraiment pas la
De quoi fouetter un cœur
Qui bat la campagne et galope...
C'est la faute commune
et le péché véniel,
c'est la face cachée
de la lune de miel
et la rançon de Pénélope...
Et la rançon de Pénélope.

" pour lui rendre hommage Il est d'autre moyen et {...} je les connais"

Ayant avecques lui toujours fait bon ménage
J'eusse aimé célébrer sans être inconvenant
Tendre corps féminin ton plus bel apanage
Que tous ceux qui l'ont vu disent hallucinant.

C'eût été mon ultime chant mon chant du cygne
Mon dernier billet doux mon message d'adieu
Or malheureusement les mots qui le désignent
Le disputent à l'exécrable à l'odieux.

C'est la grande pitié de la langue française
C'est son talon d'Achille et c'est son déshonneur
De n'offrir que des mots entachés de bassesse
A cette incomparable instrument de bonheur.

Alors que tant de fleurs ont des noms poétiques
Tendre corps féminin' c'est fort malencontreux
Que la fleur la plus douce la plus érotique
Et la plus enivrante en ait de plus scabreux.

Mais le pire de tous est un petit vocable
De trois lettres pas plus familier coutumier
Il est inexplicable il est irrévocable
Honte à celui-là qui l'employa le premier

Honte à celui-là qui par dépit par gageure
Dota de même terme en son fiel venimeux
Ce grand ami de l'homme et la cinglante injure
Celui-là c'est probable en était un fameux.

Misogyne à coup sûr asexué sans doute
Au charmes de Vénus absolument rétif
Etait ce bougre qui toute honte bue toute
Fit ce rapprochement d'ailleurs intempestif.

La malpeste soit de cette homonymie
C'est injuste madame et c'est désobligeant
Que ce morceau de roi de votre anatomie
Porte le même nom qu'une foule de gens.

Fasse le ciel dans un trait de génie
Un poète inspiré que Pégase soutient
Donne en effaçant d'un coup des siècles d'avanie
A cette vraie merveille un joli nom chrétien

En attendant madame il semblerait dommage
Et vos adorateurs en seraient tous peinés
D'aller perdre de vue que pour lui rendre hommage
Il est d'autre moyen et que je les connais
Et que je les connais.

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C
Bonsoir, <br /> C'est sûr que nous entrons dans le monde de Brassens par moult connaissances, il sera toujours là dans nos vies.<br /> Bonne fin de semaine<br /> @mitié
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